1. Depuis vingt ans, les rapports d’étude sur la relance du marché de l’art en France[1] – entendu comme celui des œuvres et objets d’art -, se succèdent avec deux constances : une thématique récurrente, le handicap que constituerait le régime de la Taxe sur la Valeur Ajoutée ; et l’ineffectivité des propositions de réforme. En effet, à l’exception du statut des commissaires priseurs[2], totalement modifié pour l’adapter à l’internationalisation des échanges et se conformer à l’uniformisation imposée par l’Union européenne, toutes ces propositions de réforme sont restées lettre morte. Et pourtant, la question de l’opportunité d’une réforme se pose aujourd’hui avec plus de prégnance qu’hier. En 2010, la France avec 5% du marché des ventes aux enchères est passée au 4ème rang derrière la Chine, qui vient elle-même après les Etats Unis (avec 30% du marché), et le Royaume Uni (avec 19% du marché). Certes, le marché des ventes aux enchères ne représente qu’une partie du total des ventes sur le marché de l’art. Il n’en est pas moins représentatif de la situation. Ce marché de l’art en France va mal. Et s’il continue de croître, il croît trois fois moins que le marché américain.
2. Il est difficile d’établir une corrélation entre le système fiscal et la délitescence du positionnement de la France sans s’engager dans un débat militant ou idéaliste. Les analyses économiques sur la situation du marché, se sont multipliées ces dernières années[3]. Leurs conclusions divergent. D’aucuns pointent les mutations conjoncturelles et structurelles du marché. De fait, il ne fait nul doute que l’essor international des collections et la mondialisation des échanges a transformé ce marché, favorisant les pays qui se sont tournés vers l’extérieur dès le XIXème siècle ou ceux dont le développement économique génère l’arrivée massive de nouveaux collectionneurs. De même, la vivacité et le pragmatisme de certains acteurs (tels les maisons de ventes du Royaume Uni qui ont très rapidement développé un savoir-faire interprofessionnel, adopté des stratégies agressives pour faire venir les acheteurs, et transformé le statut des ventes aux enchères dès 1978[4]), la réapparition de professionnels sur un marché globalisé (ainsi en est-il de la Chine ou de la Russie), ou encore l’essor de pays émergents tel l’Inde, sont des arguments convaincants. Il demeure, la question du régime de la TVA revient de manière récurrente pour expliquer ce déclin[5].
3. Certes, la TVA pèse plus en France que sur les autres places fortes du marché de l’art, hors Union européenne. Son régime a, en effet, fait l’objet d’un abandon de souveraineté des Etats membres, lesquels l’ont unifié. Il est régi par la 6ème directive (94/5/CE) du Conseil du 14 février 1994, complétant le système commun de la TVA et modifiant la 7ème directive (77/388/CEE)[6]. Par conséquent, sauf régime dérogatoire admis jusqu’en 1999 notamment pour l’Allemagne et le Royaume Uni, les régimes de TVA en Europe sont quasi uniformes. Pourtant, le régime fiscal de la TVA est d’une complexité telle, que la vertu des dérogations conçues au niveau européen comme autant de régimes de faveur, s’en trouve annihilée[7].
4. La présente étude se veut à la fois analytique et prospective. Elle vise à mettre en évidence les diverses options disponibles pour réformer le régime de la TVA sur les objets d’art, et les conséquences qui pourraient en être attendues. Toutefois, une réforme, par définition, induit un « changement de caractère profond, radical»[8]. Par ses effets et sa radicalité, une réforme ne peut donc être engagée sans en avoir apprécié au préalable la nécessité. Cette appréciation implique en l’occurrence de circonscrire les spécificités de ce marché, et l’adéquation du régime fiscal avec les finalités poursuivies par les législateurs communautaire et national. Les réformes envisagées par les rapports Chandernagor, Gaillard ou Bethenod, sont à cet égard, riches d’enseignements. Trois ans après le dernier rapport réalisé sur cette question, la présente étude permet à la fois de faire la synthèse des propositions et de ce qui a été fait ou devrait être fait. Elle nous conduira ensuite à définir exactement les mesures susceptibles d’améliorer ce système. La question est d’autant plus intéressante que la TVA sur le marché de l’art a, sous ses dehors complexes et rébarbatifs, un fort contenu idéologique qui révèle la vision qu’a un Etat de la place de l’art, en même temps qu’elle renvoie au problème de l’efficacité fiscale.
5. Quelles raisons peuvent justifier une intervention des politiques et acteurs du marché de l’art pour agir, notamment au niveau européen, et améliorer ce système ? La réponse doit partir d’un constat de lege lata, du régime de la TVA sur les œuvres d’art. Cette étude liminaire permettra de conclure à l’inefficacité des régimes de faveurs en raison de leur complexité et incidemment à la nécessité de réformer. Une fois établie la nécessité fiscale de réformer ce régime (I), il nous appartiendra de démontrer, de lege ferenda, en quoi la réforme répond à une nécessité politique (II).
Un équilibre doit être trouvé entre l’incidence patrimoniale de l’impôt et la valeur symbolique des transactions sur les objets d’art. La question aujourd’hui n’est pas tant de réduire ce prélèvement, mais « de le remettre à plat, de mieux le(s) répartir, de le(s) rendre plus simple(s), plus équitable(s), plus lisible(s) »[9]. Quatre principes guident la réforme ci-après proposée : simplifier, uniformiser, adapter, alléger.
a . Une réforme pour simplifier
Simplifier le système pour permettre au contribuable d’en faire un outil de gestion :
Le rapport Doing Business de la Banque mondiale opère un classement de « l’attractivité fiscale » des Etats, en considération de critères, riches d’enseignement[10]. Ce classement s’opère sur la base des taux d’imposition, de la complexité des systèmes fiscaux et de la qualité des mécanismes de recouvrement. Eu égard à la période de récession économique, la conjoncture rend contestable une réforme qui affecterait en volume le poids des charges sur ce marché. En revanche, tant la complexité du système fiscal, que la qualité des mécanismes de recouvrement peuvent être améliorées. C’est donc la modification des ces deux derniers éléments qui peuvent contribuer à abonner la fiscalité, afin d’encourager l’investissement et stimuler la croissance.
Il est nécessaire de réformer notre système fiscal pour le parfaire[11]. Puisqu’il y a un marché, et volonté politique de ne pas considérer les objets d’art comme des produits de consommation comme les autres, le législateur doit adopter des dispositions qui puissent être des outils au service de la libéralisation des échanges des œuvres d’art. Si finalement, la complexité du régime le rend abscons[12], il perd son efficacité et sa finalité première, c’est à dire son caractère incitatif.
Simplifier le système pour réduire la charge bureaucratique supportée par le contribuable – Cette complexité va à l’encontre de l’esprit même de la Déclaration des Droit de l’Homme et du citoyen. Son article 13 prévoit en effet que l’impôt « doit être également réparti(e) entre les citoyens en raisons de leurs facultés ». Pourtant, s’agissant de la TVA, force est de convenir qu’il est fait moins référence aux facultés contributives des contribuables, qu’aux facultés professionnelles et intellectuelles pour parvenir à comprendre ce régime. Or, s’agissant d’un impôt indirect, le collecteur se trouve être un agent économique. La charge de la collecte pèse donc sur lui, ce qui ne l’exonère pas d’un éventuel contrôle. Quand l’accumulation invraisemblable de règles complexes et de dispositions dérogatoires est telle qu’elle ne permet pas au contribuable de le comprendre puis d’en exploiter tous les ressorts, l’instrument de politique publique perd sa fin première.
Simplifier en admettant le libre choix de l’option des régimes de taxation – Pour les professionnels, le principe de la taxation retenue par la 7ème Directive est celui de la TVA sur la marge bénéficiaire. Ce régime présente un avantage financier majeur pour leur bénéficiaire qui voit la base imposable de la TVA cantonnée au montant de la marge qu’ils ont réalisé. Toutefois, à l’heure actuelle, l’administration fiscale n’admet pas que le contribuable puisse bénéficier de ce régime de taxation dès lors qu’il a opté implicitement pour le régime de droit commun en déduisant la TVA qu’il a supportée, au moment de l’achat. Elle admet cependant la démarche inverse, c’est-à-dire la possibilité d’opter pour le régime de droit commun (et donc la déductibilité de la TVA supportée lors de l’acquisition, mais concomitamment l’assujettissement à la TVA sur l’intégralité du prix de cession au moment de la revente), alors même que le contribuable avait initialement opté pour le régime de taxation sur la marge. Les juridictions administratives considèrent que la déduction de la TVA supportée lors de l’acquisition vaut renonciation implicite, mais définitive au régime de la marge[13]. Une telle interprétation de la directive paraît particulièrement étroite et éloignée de la téléologie de ces dispositions, qui doit-on le rappeler, sont réputées favoriser ces transactions. Ladite interprétation tend à faire de ce régime, plus un piège qu’un régime de faveur. Pourquoi interdire au contribuable d’exploiter tous les ressorts d’un régime, alors que l’on sait que le stock de ces professionnels absorbe déjà une trésorerie très importante, et que la déduction de la TVA peut contribuer à alléger ? Est-ce la manifestation d’une méfiance de l’administration et des soupçons qu’elle nourrit qui guident cette analyse[14] ? Le préjudice pour l’Etat serait nul, puisque la TVA déduite lors de l’acquisition serait ensuite restituée au jour de la revente, si le contribuable « renonce » au régime de droit commun. La présomption de bonne foi devrait dominer dans les relations entre les contribuables et l’administration. Une plus grande flexibilité de ces options, et la possible renonciation d’un régime contribuerait à renforcer la sécurité fiscale de ces échanges. Cette mesure pourrait être utilement complétée par une amélioration de l’information en matière de fiscalité dérogatoire, afin de respecter le principe d’égalité devant l’impôt. Parce que le contribuable moyen est mis dans l’incapacité de gérer ces aspects fiscaux, l’administration fiscale doit, comme elle tend à le faire depuis plusieurs années, développer ses services de conseils, sans renoncer à son rôle d’administration régalienne de contrôle, et palier cette déficience législative.
b . Une réforme pour alléger
Alléger en adoptant un système de flat Tax (taux unique d’imposition) – L’adoption d’un taux à 5.5%, comme pour nombre de transactions portant sur des biens culturels, semble un compromis adapté, tant à la situation économique de la France, qu’à l’idée que l’on peut se faire du marché. Le taux de 19.6% conduit à un détournement du marché français au profit du marché Suisse (TVA à 7,6% au taux normal et 3,6% au taux réduit), du marché américain (sale taxes de 7 à 8 % au taux normal) ou encore du marché japonais (taxe à 5% au taux normal). La question ne se pose pas dans les mêmes termes à l’égard du marché britannique dont les taux de TVA sont quasi identiques à ceux de la France (20% au taux normal et 5% au taux réduit). La Présidente du comité des galeries d’art proposait d’ailleurs que soit mis en place un système permettant l’application d’un taux réduit lorsqu’il existe une TVA en amont (artistes assujettis, importations) à l’image de ce qui se faisait en Allemagne qui bénéficiait jusqu’en 1999 d’une dérogation. Ce pourrait être un palliatif à l’application du taux nominal aux transactions soumises au régime de taxation sur la marge[15]. Il est regrettable que l’option pour le régime de la marge interdise que la TVA supportée en amont sur le prix d’achat de l’œuvre, soit déductible de la TVA collectée[16]. Cela entraîne un surenchérissement du prix final de l’œuvre ou plus généralement une marge commerciale moindre pour la galerie[17]. De ce fait, les œuvres importantes seraient rarement négociées sur le territoire de l’Union Européenne. Les œuvres entrées en importation temporaire repartiraient à l’exportation vers les pays tiers, afin de ne pas subir la TVA. Ce schéma conforte encore le principe du flat tax. Le taux unique aurait le mérite de la simplicité. Mais il ne serait pas plus intéressant financièrement pour les galeristes. Le taux moyen s’imposition sur la marge forfaitaire, calculée sur une marge évaluée approximativement à 60% du prix de vente, est de 3.52 %. Il est de 11.76% lorsque la marge bénéficiaire est appliquée. Mais le bénéfice du régime de la marge serait la seule hypothèse où le taux de 19.6% aurait à être appliqué.
Alléger le taux d’imposition : Aujourd’hui, une réforme du droit de suite est envisagée[18] parce que ce droit grèverait les transactions sur les œuvres d’art d’une charge financière supplémentaire. Il paraît pourtant difficile de réduire ce droit de suite, d’un point de vue éthique, puisque le droit de suite n’est pas un prélèvement « fiscal », mais revient à l’auteur de l’œuvre ou ses ayants droits jusqu’à 70 ans après la mort de l’artiste[19]. Or, il semble injuste de faire peser sur les artistes et les ayants droits, un allègement des charges constatées sur les transactions, alors que l’essentiel de ces charges est constitué de prélèvement fiscaux. Il semble en outre, contradictoire de prétendre que le poids de la TVA sur le marché de l’art n’a aucune incidence et proposer dans le même temps, de supprimer le droit de suite au bénéfice des ayants droits voire des artistes, parce qu’il constituerait une entrave. Ce taux va de 0.5% à 4% pour les œuvres de plus de 50 000 euros (sans pouvoir excéder 12 500 euros). Aujourd’hui, nombre des transactions sont assujetties à une TVA au taux normal, donc à 19.6%, soit parce que la cession est faite par l’intermédiaire d’un professionnel, soit parce que l’objet d’art n’entre pas dans le champ d’application de l’article 98 annexe A du CGI qui limite le bénéfice de ce régime à ceux figurant dans cette liste limitative. Une telle situation n’est pas admissible. Le taux réduit doit être étendu à toutes les cessions d’objet d’art. Ces disparités dans les taux à l’intérieur même du marché français ne peuvent être sans incidences sur les transactions. La simplification serait ainsi acquise.
Supprimer la TVA à l’importation ? Selon certains professionnels, la TVA à l’importation, appliquée à l’entrée de l’Union européenne détourne les ventes vers des places comme New York ou Genève. Selon la Directrice des musées de France, il faut régler le problème du taux de TVA à l’importation des œuvres d’art, qui est aujourd’hui et symptomatiquement de 5.5 % en France et 0 % aux Etats-Unis. Alors que l’on sait que 70 % de ce que vend Sotheby’s et Christie’s à Londres et surtout à New-York provient de France[20]. Néanmoins, la suppression présenterait l’inconvénient d’engendrer une distorsion entre artistes vivants et ayants droits ou intermédiaires du marché de l’art qui sont eux assujettis à la TVA. En outre, cette TVA est aujourd’hui à 5.5%. A défaut de la supprimer, il faudrait au moins homogénéiser et conceptualiser la notion d’œuvre d’art pour étendre plus largement l’application du taux réduit à d’autres formes d’expressions artistiques[21] Elle devrait l’être pour tous les objets d’art. A défaut de supprimer la TVA à l’importation, devrait-on du moins la limiter aux œuvres de moins de 50 ans pour faciliter le retour des œuvres d’art en France[22].
Les arguments économiques soulèvent également la question de la réduction en volume de ce prélèvement obligatoire, voire de sa suppression totale. Le fait que la baisse des prélèvements obligatoires puisse doper la croissance est une conviction largement répandue chez les économistes.
Au rebours de cette opinion, certains considèrent qu’une suppression totale de la TVA sur les objets d’art n’est pas la meilleure solution pour les raisons suivantes. La TVA, notamment sur les transactions internationales, contribue à réduire le trafic illicite des marchandises en imposant la déclaration des cessions. Elle est donc un vecteur de contrôle des flux réels des échanges. Pourtant, il paraît injuste de faire peser cet impôt sur les échanges intervenant entre personnes qui ne bénéficient pas d’une même mobilité internationale, sauf à perdre en légitimité. Economistes et fiscalistes l’affirment : il faut changer le territoire de la fiscalité en créant des impôts internationaux et considérer que l’impôt est à la fois instrument juridique, mais aussi le reflet d’une conception de la société et de la hiérarchie des valeurs. En cela, le droit de suite allait dans le bon sens, qui permettait notamment par la Convention de Berne d’internationaliser la règle[23], augmentant de facto la sécurité juridique et les droits patrimoniaux des auteurs et des ayants droits.
Par ailleurs, selon la Commission européenne la TVA n’a qu’une incidence limitée sur les prix de vente. Selon elle, compte tenu des mesures de compensation budgétaires qui seraient prises, ” l’effet global sur la demande dans un secteur particulier et sur le marché de l’emploi serait pour le moins incertain. A ce jour, aucune constatation empirique ne permet de tirer une conclusion différente “[24]. En conclusion, une réforme apparait aujourd’hui, nécessaire, voire impérative. Mais elle ne tendrait pas nécessairement à réduire en volume ce prélèvement, mais à en réduire les impacts négatifs, notamment en remédiant à son extrême complexité. Son efficacité reste cependant conditionnée à la définition de ses contraintes.
c . Une réforme pour adapter
Conceptualisation de la notion d’œuvre d’art et homogénéité de la qualification : La réglementation de la TVA est figée sur le passé[25] et renvoie au modèle romantique de l’œuvre et de l’auteur. Le périmètre actuel du régime de la TVA est conditionné à la notion fiscale d’œuvres d’art. Or, les qualifications comme les fondements sont hétérogènes. De même, les notions de photographie d’art, d’objet de collection renvoient toutes à des supports législatifs différents. Ainsi l’œuvre d’art est censée trouver un cadre dans une liste exhaustive énoncée dans le code général des Impôts[26] : quant on connait l’importance de la recherche en matière artistique et le souci de diversité des artistes, tant en ce qui concerne les sujets, que les formes ou les techniques, on ne peut que s’étonner de ce choix législatif[27]. Serait-ce une nouvelle expression de « l’autonomie du droit fiscal » ? Ainsi, la liste figurant à l’article 98 annexe A du CGI, et réputée circonscrire de manière exhaustive toutes les œuvres d’art, exclut notamment une partie de l’art contemporain, notamment l’art conceptuel, l’art numérique et les installations[28]. S’agissant des photographies d’art, il faut aller chercher dans les dispositions législatives relatives à la taxe professionnelle pour pouvoir circonscrire l’acception fiscale de la notion de photographies d’art. S’agissant des biens d’occasion enfin, c’est dans la nomenclature douanière qu’il convient de chercher les contours de la notion[29], laquelle conduit d’ailleurs contre toute attente à ne pas soumettre au régime fiscal des biens d’occasion les manuscrits, les bijoux et les arts décoratifs du XXème siècle.
Dès lors, s’impose l’idée selon laquelle le droit fiscal doit s’enrichir d’une définition abstraite de l’œuvre d’art adaptée à la diversité des formes d’expression artistique. Ainsi pourrait être associée à la notion d’œuvre d’art, la notion de « dispositif artistique visuel ». La définition donnée de cette notion devra être commune à l’ensemble des dispositions relatives aux régimes spécifiques aux œuvres d’art et être complétée par des critères de qualification permettant de distinguer l’œuvre d’art des objets d’artisanat, ou du spectacle vivant. Ce faisceau d’indices pourrait être composé de critères se déplaçant de l’esthétique vers le philosophique, ou de la « forme » au « fond ». Ils pourraient être scindés en deux catégories : des critères objectifs et des critères subjectifs. Les critères objectifs prendraient en compte la présentation de l’œuvre dans un lieu d’exposition public ou privé en qualité d’œuvres d’art qui renvoie au critère de la perception par le public[30]. Le critère de la fonction de l’œuvre d’art, indépendante de la fonction initiale ou originelle, peut être un second critère objectif. Les critères subjectifs peuvent ressortir des conceptions traditionnellement retenues en droit de la propriété intellectuelle. Ainsi, M. PELLAS propose de retenir trois critères. La dimension matérielle de l’œuvre tout d’abord, qui fait référence à la rareté du bien, la dimension fonctionnelle ensuite, qui met en exergue l’impératif esthétique[31] et la dimension personnelle de l’œuvre qui a trait à l’artiste est définie comme l’empreinte de la personnalité de l’auteur, enfin. Ce dernier critère peut être complétée par le critère intentionnel de l’artiste, qui a identifié l’œuvre et la présentée comme telle[32]. Ces critères, complémentaires et non cumulatifs, permettraient soit de compléter la liste définie à l’article 98 annexe A du CGI, soit de s’y substituer.
d . Une réforme pour uniformiser
Il arrive que de subtiles nuances s’imposent, alors même qu’elles ajoutent à la complexité du système, parce que l’avantage qu’elles procurent est supérieur au préjudice que cette hétérogénéité génère. Ainsi en est-il de la notion d’artiste, diversement retenue par le législateur fiscal. En dehors, de cette hypothèse, l’amélioration d’un système fiscal induit l’uniformisation des concepts et des sources.
Uniformiser la notion d’artiste ? – La notion d’artiste est retenue différemment par le législateur fiscal. Ainsi, les « auteurs d’œuvre de l’esprit » bénéficient d’un régime de franchise en base spécifique[33], lequel présente un avantage financier non négligeable pour eux. La notion « d’auteur d’œuvres de l’esprit » renvoie aux paragraphes 1 à 12 de l’article L. 112-2 du Code de la Propriété Intellectuelle[34]. En revanche, seuls « les artistes », telles que définis à l’article 98 annexe A du Code Général des Impôts, peuvent assujettir les livraisons qu’ils effectuent à la TVA au taux réduit. Pourquoi retenir deux notions différentes de l’artiste. D’autant que le « spectre » que recouvrent les dispositions du Code Général des Impôts est beaucoup plus restreint que celui de la définition posée par le Code de la Propriété Intellectuelle. Une uniformisation paraît néanmoins difficile. La faiblesse du montant du régime en base réduit très sérieusement le champ d’application de ce régime. Seuls les artistes réalisant un chiffre d’affaires inférieur à 42 300 euros en 2010 peuvent s’en prévaloir. Son coût pour l’Etat est donc relativement faible. Au contraire, le bénéfice du taux réduit n’est pas limité à la réalisation d’un chiffre d’affaires maximum. Par conséquent, l’application uniforme de la notion d’artiste entendu comme « tout auteur d’œuvre de l’esprit » aurait des conséquences financière trop importantes s’agissant de l’application du taux réduit. Etendre le bénéfice du taux réduit à tous les auteurs d’œuvres de l’esprit autre que des « beaux arts », aurait des conséquences financières très lourdes pour l’Etat. Symboliquement ce régime ne constituait un régime de faveur qu’à destination des auteurs d’œuvres d’art exclusivement. Cette distinction méritait donc d’être retenue. Une certaine homogénéité pourrait néanmoins être obtenue en uniformisant la notion d’œuvre d’art. De même l’application à toutes les cessions d’un taux à 5.5% que nous promouvons comme un outil de simplification s’impose, tant pour remédier à la rémanence de l’impôt, qu’aux distorsions de concurrence intra et extra européenne.
Uniformiser le taux applicable pour remédier à la rémanence de l’impôt – On explique la complexité du régime et sa spécificité par la nécessité de remédier au système de la rémanence de l’impôt[35]. En principe, la TVA doit être neutre pour les intermédiaires et ne peser que sur le consommateur final. Tel n’est pas le cas s’agissant du marché des œuvres d’art. Dans ce contexte, il est utile de rapprocher les difficultés rencontrées par certains acteurs du marché de l’art avec celles rencontrée par les restaurateurs. Ceux-ci plaidaient pour une réduction de la TVA sur leurs services à 5,5% en raison de la différence entre la TVA qu’ils collectaient (assujettis jusqu’à cette réforme à 19.6%) et la TVA qu’ils pouvaient déduire (fixée à 5.5% pour tous les produits alimentaires). Ce qu’ils ont obtenu. L’uniformisation de ce taux à 5.5% sur toutes les cessions d’œuvres d’art serait pareillement une solution équitable. La charge fiscale n’est donc pas neutre pour les professionnels du marché de l’art, mais elle pourrait le devenir si un régime de TVA au taux réduit s’appliquer à l’ensemble des transactions sur les œuvres d’art.
Uniformiser le taux applicable pour prévenir les distorsions de concurrence – Un taux commun à l’ensemble des pays de l’Union s’impose. Les professionnels du marché de l’art français font trop souvent les frais du souci d’exemplarité de leurs gouvernants. Ils ont dû ainsi subir la concurrence de l’Allemagne et du Royaume-Uni, qui ont bénéficié d’un régime transitoire prévu par la 7ème directive, jusqu’en 1999 en matière de TVA[36]. Il est inenvisageable et contreproductif d’admettre une quelconque forme de dumping fiscal à l’intérieur des pays de l’Union. En concédant un différentiel de taux à l’intérieur de l’Union, il est directement et formellement porté atteinte à la concurrence.
Le constat réalisé des manques et défaillances du système de TVA sur les œuvres d’art tel qu’il est appliqué aujourd’hui, ainsi que la présentation des solutions concrètes que nous avons proposées révèlent la nécessité fiscale de la réforme. Il apparaît néanmoins nécessaire d’en apprécier l’opportunité politique.
Un régime fiscal abscons – Il existe bien un régime fiscal du marché de l’art[37]. Mais contre toute attente, il ne permet pas de considérer les acteurs du marché de l’art comme des contribuables privilégiés en raison de son extrême complexité. Les subtilités, les contradictions, l’hétérogénéité des sources ont rendu ce régime fiscal totalement contreproductif[38]. Une réforme s’impose tant pour des raisons de politique culturelle (A), que pour des raisons de politique économique(B).
A . Une politique culturelle à défendre au sein de l’Union
Quelle place veut-on donner à l’art ? Quel rôle l’Etat doit-il ou peut-il jouer sur le marché ? L’œuvre d’art est ambivalence : pour les uns, signe extérieur de richesse contribuant à l’identité culturelle d’un pays, pour les autres, signe de richesse matérielle des individus, réservée à une classe sociale, qu’elle distingue en même temps qu’elle anoblit[39]. Cette ambivalence renvoie à la dimension de l’œuvre, marchande ou symbolique. De la perception des objets d’art dépend à la fois la politique culturelle(1) et la politique fiscale d’un état (2).
1 . Une politique spécifique pour des biens hautement symboliques – M. SCHMITT le fait justement observer : « Si le marché des biens culturels a un poids économique et social direct relativement limité, son importance réelle doit être réévaluée en tenant compte des différents paramètres d’utilité collective »[40]. Les commerces d’art sont un élément d’attractivité d’un Etat, participant à sa notoriété, au potentiel créatif de ces artistes, dont les événements internationaux constituent désormais un argument touristique porteur[41]. Le législateur communautaire ne s’y est pas trompé, justifiant ainsi une intervention publique sur ce marché par ces régimes de faveur, au nom de la nature spécifiques des biens, objet des transactions. De fait, le travail de repérage des professionnels de marché de l’art, de collecte, d’étude, d’identification et de conservation, n’apparaît pas très éloigné d’une mission de service public, à savoir la promotion de la création artistique et la protection du patrimoine national. Cependant, l’intention louable du législateur ne suffit pas à palier les carences et les incohérences du système. La sédimentation de dispositions de circonstances, prises au coup par coup, comme l’interprétation de ces dispositions par la doctrine administrative, fait figure de paravent à d’autres préoccupations moins avouables, telle la rentabilité fiscale. L’on doit dès lors s’interroger sur les valeurs que l’on veut mettre à la base de ce droit. A l’origine, il y a un postulat culturel prégnant dans le débat qui doit guider cette réforme : la symbolique doit rester à l’esprit, sans pour autant concéder au militantisme. Mais le droit fiscal ne peut être mis au service d’une politique culturelle, s’il ne respecte pas le principe d’efficacité fiscale.
2. Une politique imposée par un souci d’efficacité fiscale – Intervenir sur ce marché ou pas ? L’idéal de neutralité de l’impôt, qui à ce titre conduirait à influer le moins possible sur le comportement des acteurs économiques, n’est pas un argument pertinent pour s’opposer à une nouvelle réforme de la TVA. Les dépenses fiscales ou les ressources demeurent des instruments privilégiés de conduites des politiques publiques. Il ne s’agit pas seulement de débattre de l’opportunité d’un interventionnisme de l’état, qui est pourtant en France une pratique séculaire[42] et de l’utilisation subséquente de l’impôt dans un but économique ou social, mais a minima de s’assurer que le régime fiscal « n’atonise » pas le marché. Précisément, les régimes fiscaux de la TVA actuellement en vigueur, dérogatoires du droit commun, ont été conçus comme des outils de politique culturelle. L’objectif du législateur communautaire était de favoriser les acteurs de ce marché. Il y a donc interventionnisme de l’Etat, mais les effets de ces dispositions viennent à rebours de l’analyse téléologique de ces textes : s’ils constituent un manque à gagner pour la collectivité, ils n’ont pas l’efficacité attendue. Les théories de l’impôt, que l’on soit libéral ou solidariste, confortent encore la nécessité de cette réforme. Si les libéraux prônent un impôt sur la consommation et qui varie en fonction de la marchandise, les solidaristes au contraire estiment que l’impôt doit d’abord porter sur les revenus du travail et du patrimoine, être progressif et redistributif. A s’en tenir à la conception des premiers, la nature culturelle des marchandises concernées, le taux devrait être faible (comme il l‘est aujourd’hui en France de la TVA sur les journaux, les livres et les programmes de radio et de télévision[43]). Tel n’est pas le cas s’agissant des objets d’art. Les taux varient de 5.5% à 19.6%. S’agissant de la conception retenue par les seconds, le prélèvement fort sur un marché s’avère contreproductif. Précisément avec un taux à 19.6%, on pénalise celui-ci alors qu’il agit sur des acteurs économiques déjà en difficulté : les artistes au premier titre.
3 . Une politique portée au niveau européen – L’objection la plus sérieuse à une modification du régime de la TVA sur le marché de l’art est celle tirée de la dimension européenne de ce corps de norme. Le régime fiscal des cessions des objets d’art, de collection ou d’antiquité dans l’Union est fixé par la 7ème Directive. Ces dispositions, sont entrées en vigueur le 1er janvier 1995 et codifiées aux articles 297 A à F du CGI. D’un point de vue législatif, la réforme doit donc être européenne. Parce que le régime de la TVA a fait l’objet d’une véritable délégation de souveraineté, toute modification doit être opérée par les instances européennes pour répondre aux objectifs premiers de cette Union, à savoir éviter les distorsions de concurrence et créer un marché unique.
Il est en effet difficile de comprendre pourquoi l’argument de l’exception culturelle française, qui est excipée par la France pour défendre une TVA à 5.5% sur les livres numériques, ne pourrait pas s’appliquer aux objets d’art. Cela justifie de poursuivre activement le débat au plan européen afin d’obtenir du conseil un consensus sur la faculté des Etats membres d’accorder un taux réduit. La conciliation au niveau européen est peu probable sans volonté forte et concertation de la France et de la Grande Bretagne, qui sont les deux seul pays de l’Union à avoir un marché ouvert sur l’extérieur. Force est de constater qu’il n’y a ni mobilisations des acteurs du marché de l’art, ni volonté politique forte pour porter ce projet d’intérêt national au niveau européen[44]. La politique culturelle matérialisée par des mesures fiscale ne peut être porté et avoir de portée que s’il y a une réelle volonté politique.
La réforme, conforme à la politique fiscale de l’Union européenne et à la tradition française, s’impose donc pour des raisons de politique culturelle. Les considérations économiques ajoutent encore à cette analyse.
B . Une politique économique adaptée aux mutations conjoncturelles et structurelles
La réforme du régime de la TVA est une nécessité économique. Elle s’impose dans un contexte conjoncturel morose pour le marché français (1), et celui d’une internationalisation des échanges (2).
1. Une réforme nécessitée par la fragilité du marché – Chacun s’accorde à considérer que le marché français va mal depuis une dizaine d’année, et que les pays de l’Union sont confrontés à une concurrence redoutable des Etats-Unis, de la Chine, et des pays émergents. Le marché va mal, mais il résiste. Ainsi, alors que la croissance économique est au ralenti au premier semestre 2011, le marché de l’art vient de connaître son meilleur premier semestre de tous les temps, dépassant les sommets atteints depuis 2007/2008, avec des produits des ventes en croissance de 34% par rapport au même semestre 2010[45]. Cette évolution atteste d’une part, de l’incidence relative de la TVA sur la réaction du marché, d’autre part, que les acteurs du marché de l’art français n’ont pas failli, L’anticipation, les ajustements structurels entre l’offre et la et la demande, ainsi que la réforme des commissaires priseurs semblent donc être le vecteur du sursaut économique du marché français comme cela a été le vecteur du développement des leaders mondiaux dès le XXème. Cela ne veut pas dire qu’une réforme de la TVA n’a plus d’objet, bien au contraire. Elle s’avère indispensable pour ne pas léser le marché hexagonal qui peine à trouver ses marques au XXIème siècle.
2 . Une réforme nécessitée par l’internationalisation des échanges : D’un point de vue économique, la réforme doit se penser au niveau mondial en raison de l’internationalisation des échanges. Dans une période de récession, il n’est pas question de prôner une politique de dumping fiscal, mais de ne pas léser un marché d’autant plus pénalisé que les objets d’art sont d’une grande mobilité. En effet, les grandes entreprises et les hauts revenus qui participent à un système d’échange mondialisé sont les mieux placés pour organiser des stratégies d’évitement de l’impôt. D’autant que, structurellement, les grandes fortunes en France sont moindres qu’aux Etats-Unis ou en Russie. Les risques de délocalisation doivent toutefois être relativisés car ils ne concernent que les biens culturels les plus importants. Les autres sont souvent cédés à proximité de leur lieu de situation, du lieu de résidence de vendeur ou de l’intermédiaire. Pour autant, il est acquis que la demande interne sera moindre à l’avenir qu’elle ne l’est aujourd’hui. Le régime de la TVA sur les transactions internationales doit donc être tout particulièrement élaboré, pour éviter que la France, souvent qualifiée de réservoir de biens culturels ainsi qu’en atteste sa balance commerciale, ne se voit dépouillée. La simplification des dispositions fiscales palliera l’insécurité juridique pénalisante pour la dynamique de développement à l’international.
3 . Une réforme respectueuse des spécificités du marché – Structurellement, ce marché est marqué par un double aspect : sa segmentation et la grande disparité des situations économiques entre les professionnels.
La segmentation du marché – Pour qualifier la disparité « des » marchés de l’art, M. SCHMITT évoque sa « fragmentation » : art ancien, art moderne, art contemporain ; multiplicité des supports notamment immatériels, des techniques, caractère éphémère de l’œuvre… Or, tous les segments subissent inégalement la concurrence des marchés étrangers. La position de la France s’agissant du marché du XVIII, comme à l’égard de la peinture impressionniste n’est pas à défendre. En revanche, le marché de l’art contemporain ne s’est pas développé en France, comme aux Etats Unis après la seconde guerre mondiale[46]. A ceci, s’ajoute la complexité de l’évaluation et de la cotation, la logique des artistes contemporains qui tendrait pour certains à subvertir les règles existantes pour inventer de nouvelles règles, lesquelles contribuent tous à déconnecter le législateur ou l’administration des véritables enjeux artistiques. Ces spécificités rendent nécessaires une action concertée des pouvoirs publics et des professionnels du marché pour favoriser le développement dynamique et adéquat d’un marché segmenté.
Les disparités des situations économiques : Une autre contrainte majeure tient à la disparité des situations économiques des professionnels du marché. Malgré leur passion commune pour l’art, l’extrême diversité des intérêts en jeu ne favorise pas une lecture globale des régimes fiscaux de ces professionnels ou même de leur homogénéisation. Ainsi entre galeristes et artistes, les antagonismes sont identiques à ceux rencontrés entre producteurs et circuits de commercialisation. Les disparités sont également importantes entre les intermédiaires dans leurs pratiques (visibilité des grandes ventes publiques et confidentialité des négociants en art) ; entre les artistes méconnus ou promus ; entre les galeristes et les négociants d’art, entre les commissaires priseurs des grandes salles des ventes parisiennes et les commissaires priseurs de province…
Symboliquement, le marché de l’art mérite une attention toute particulière. La complexité du régime de la TVA constitue aujourd’hui une entrave et remet en cause son efficacité. Il est donc nécessaire de le réformer en généralisant le taux réduit de la TVA à l’ensemble des transactions portant sur les œuvres d’art, en précisant les contours de la notion d’œuvre d’art pour que soit pris en compte toutes les formes d’expressions artistiques, notamment contemporaines, et en offrant plus de flexibilité aux professionnels quant au choix du régime de la marge.
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[1] Cf. en particulier : MM. AICARDI et CHANDERNAGOR, « les Conditions du développement du marché de l’art en France », Paris, La Documentation française, 1994 ; Y. GAILLARD, « Marché de l’art, les chances de la France », 1998-1999, rapport du Sénat n°330 ; M. LELLOUCHE, Rapport établi pour le compte de la Délégation pour l’Union européenne de l’Assemblée nationale, « La fiscalité du marché de l’art en Europe », 2002-2003, rapport n°649 ; M. BETHENOD, Rapport remis à Christine ALBANEL, « Propositions en faveur du développement du marché de l’art en France », 2008.
[2] Loi n°2000-642du 10 juillet 2000 et décret n°2001-650 du 19 juillet 2001 ? et plus récemment, décret n°2009-452 du 22 avril 2009 relatif à l’évolution des professions juridiques et judiciaires ; loi n°2010-1609 du 22 décembre 2010 relative à l’exécution des décisions de justice, aux conditions d’exercice de certaines professions réglementées ; loi n°2011-331 du 28 mars 2011, dite de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées.
[3] J.-M. SCHMITT, Le marché de l’art, La Documentation Française, 2008 ; M. MAERTENS, L’art du marché de l’art, éd. Luc Pire, coll. Que, Paris, 2008 et M. BETHENOD, « Propositions en faveur du développement du marché de l’art en France », précit.
[4] Selon M. Chandernagor, Londres bénéficie de maisons de vente très actives et très organisées tant quant à la gestion de la publicité, que de l’exploitation des moyens modernes de communication, que de leurs aptitudes à offrir des prestations en terme d’expertise, de conseils juridiques et fiscaux. Cf. MM. AICARDI et CHANDERNAGOR, « les Conditions du développement du marché de l’art en France », précit.
[5] H. LENA, F. DURET ROBERT, Quel avenir pour le marché de l’art ? Actes de la table ronde, Lharmattant, 1996 ; cf. également en ce sens, les comptes rendus d’entretien avec les acteurs du marché de l’art, annexés au rapport GAILLARD, précit.
[6] Cette directive a été transposée en droit français par l’article 16 de la loi de finances rectificative pour 1994 (loi n° 94-1163 du 29 décembre 1994), entrée en vigueur le 1er janvier 1995 et codifiées aux articles 297 A à F du CGI.
[7] N. PROD’HOMME SOLTNER, « La TVA et les transactions sur les œuvres d’art : Un chef d’œuvre de complexité », Dr. fisc. 2011 (à paraître).
[8] V° Réforme, Larousse, 2010.
[9] C. LANDAIS, T. PIKETTY, E. SAEZ, Pour une révolution fiscale – un impôt sur le revenu pour le XXIème siècle, éd. Seuil, Coll. La République des idées, 2011, p.7.
[10] Le rapport Doing Business a été mis en place par la Banque Mondiale. Il a pour objet de mesurer annuellement la réglementation des affaires et son application effective dans 183 économies et certaines villes au niveau infranational et régional : http://francais.doingbusiness.org/reports/global-reports/doing-business.
[11] Lorsque le Ministre de la Culture avait missionné Monsieur Bethenod pour établir un rapport sur « Un plan de renouveau pour le marché de l’art », la TVA avait été mentionnée au titre des mesures à prendre pour favoriser le retour en France des ventes qui s’effectuent à l’étranger.
[12] En ce sens, « La Fiscalité dérogatoire – Pour un réexamen des dépenses fiscales », XXI rapport du Conseil des Impôts au Président de la République, sept. 2003, spéc. p.4.
http://www.ccomptes.fr/fr/CPO/documents/divers/Rapport-fiscalite-derogatoire-complet.pdf
[13] CAA Paris 27 mars 2008, n° 04MA00523, Aff. Galerie Roger Pailhas.
[14] Rapport BETHENOD, « Propositions en faveur du développement du marché de l’art en France », précit., propos introductifs.
[15] Cité par Y. GAILLARD, « Marché de l’art, les chances de la France », précit.
[16] M.-V. MARSAN, « Droit de suite, une directive contestée », Culture Europe International, n°42, août-sept. 2004.
[17] Ce qui explique peut être, selon la Présidente du Comité des galeries d’art, que 90% du CA des galeries soit réalisé à l’exportation, et soit donc exonéré.
[18] Le droit de suite est un droit subjectif pour l’auteur d’une œuvre d’art originale – et en principe pour ses ayants droit, si l’artiste est décédé –, de percevoir un pourcentage allant de 0,25 % à 4 % du prix obtenu à l’occasion de chacune des reventes successives de l’œuvre, si la vente est effectuée par l’intermédiaire d’un professionnel du marché de l’art (C. Propr. Intell., art. L. 1228-8 et L.123-7). A propos des modalités d’application de ce droit, N. PROD’HOMME SOLTNER : « L’art et la manière de s’exonérer du droit de suite », RLDI, n°49, mai 2009, pp 79-83.
[19] Délai pendant lequel les ayants droits de l’artiste peuvent bénéficier du droit de suite.
[20] F. CACHIN, cité in Rapport Y. GAILLARD, « Marché de l’art, les chances de la France », précit.
[21] Cf. infra, sur la conceptualisation de la notion d’œuvre d’art.
[22] Proposition M. AICARDI, Rapport GAILLARD, « Marché de l’art, les chances de la France », précit.
[23] Au niveau international, le droit de suite fût introduit dans la Convention de Berne de 1886 par l’Acte de Bruxelles de 1948, qui pose un principe d’application soumis à la volonté des pays signataires, et sur base de réciprocité entre la loi nationale de l’auteur et celle de l’Etat où il réclame ce droit. Toutefois, la liberté de choix dans la mise en œuvre laissée aux Etats signataires, explique que les rares pays qui l’ont inséré dans leur droit, appliquent le droit de suite de façons très diverses.
[24] Rapport Y. GAILLARD, « Marché de l’art, les chances de la France », précit.
[25] Ibid.
[26] Article 98 annexe III du CGI.
[27] J. ICKOWICZ, Le droit face à la dématérialisation de l’œuvre d’art – Une analyse juridique de l’art contemporain, Thèse Paris II, 2009.
[28] Cette conception restrictive est commune aux législateurs et aux juridictions communautaires et de l’Union. Ainsi, ni les néons de Dan Flavin ou les installations vidéo de Bill Viola, ni l’urinoir de Duchamps ou les boîtes Brillo de Warholl ne sauraient être considérés comme des œuvres d’art au regard du droit fiscal (V. CHAMBAUD, Art et fiscalité – Droit fiscal de l’art, Ars Vivens, 4ème éd., 2011, précit., p.35 et s.)
[29] M. BETHENOD, « Propositions en faveur du développement du marché de l’art en France », précit.
[30] Cf. E. ULMER, « La notion d’œuvre en matière de droit d’auteur et l’art moderne », D. A., OMPI, 1969, p. 79 et s.
[31] J.-R. PELLAS, précit., p. 16 et s.
[32] En ce sens, G. LHUILIER, « Les œuvres d’art, res sacrae ? », R.R.J., 1998-2, p. 523 ; A. STROWEL, « L’œuvre selon le droit d’auteur », Droits, 1993, p.79-81.
[33] Art. 293 A et suivants du CGI.
[34] Art. L.112-2. : Sont considérés notamment comme œuvres de l’esprit au sens du présent code :
1° Les livres, brochures et autres écrits littéraires, artistiques et scientifiques ;
2° Les conférences, allocutions, sermons, plaidoiries et autres œuvres de même nature ;
3° Les œuvres dramatiques ou dramatico-musicales ;
4° Les œuvres chorégraphiques, les numéros et tours de cirque, les pantomimes, dont la mise en œuvre est fixée par écrit ou autrement ;
5° Les compositions musicales avec ou sans paroles ;
6° Les œuvres cinématographiques et autres œuvres consistant dans des séquences animées d’images, sonorisées ou non, dénommées ensemble œuvres audiovisuelles ;
7° Les œuvres de dessin, de peinture, d’architecture, de sculpture, de gravure, de lithographie ;
8° Les œuvres graphiques et typographiques ;
9° Les œuvres photographiques et celles réalisées à l’aide de techniques analogues à la photographie ;
10° Les œuvres des arts appliqués ;
11° Les illustrations, les cartes géographiques ;
12° Les plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie, à l’architecture et aux sciences;
13° Les logiciels, y compris le matériel de conception préparatoire;
14° Les créations des industries saisonnières de l’habillement et de la parure. Sont réputées industries saisonnières de l’habillement et de la parure les industries qui, en raison des exigences de la mode, renouvellent fréquemment la forme de leurs produits, et notamment la couture, la fourrure, la lingerie, la broderie, la mode, la chaussure, la ganterie, la maroquinerie, la fabrique de tissus de haute nouveauté ou spéciaux à la haute couture, les productions des paruriers et des bottiers et les fabriques de tissus d’ameublement.
[35] En effet, galeristes et antiquaires achètent les marchandises culturelles le plus souvent auprès des particuliers. Ils ne paient donc pas de TVA sur leurs achats (qui seraient une TVA déductible). Mais en qualité d’assujettis, ils doivent soumettre les cessions au taux de 19.6%.
[36] Le Royaume Uni avait également bénéficié d’un régime transitoire, s’agissant de l’application du droit de suite, dont il avait d’ailleurs demandé et obtenu la prorogation. N.PROD’HOMME SOLTNER, « L’art et ma manière de s’exonérer du droit de suite », précit., spéc. p. 80.
[37] V. CHAMBAUD, Art et fiscalité – Droit fiscal de l’art, précit., p.53 et s.
[38] J.-M. SCHMITT, Dict. Perm. Produits financiers, V° « Marché de l’art ».
[39] P. BOURDIEU, La distinction. Critique sociale du jugement, Minuit, 1979.
[40] J.-M. SCHMITT, Le Marché de l’art, précit., p.29
[41] A titre d’illustration, en 2010 la Biennale des antiquaires a rassemblé 50 000 visiteurs, la Foire Internationale d’Art Contemporain, 85 000 visiteurs et la Biennale d’art contemporain à Lyon, 145 000 visiteurs en 2009.
[42] G. ORSINI, L’interventionnisme fiscal, coll. Fiscalité, PUF, 1995, p. 25 ; BOUVIER (M.), Introduction au droit fiscal et à la théorie de l’impôt, Paris, LGDJ, coll. « Systèmes », 10ème édition, 2010.
[43] Ce régime de TVA à 5.5% a également été appliqué pour les activités de restauration, afin de palier aux effets de la rémanence de la TVA.
[44] Rapport Gaillard, « Marché de l’art, les chances de la France », précit.
[45] Source Artprice, Market Insight, août 2011.
[46] Sans qu’un lien de causalité soit imputé à la fiscalité. La diffusion commerciale, le rôle moteur des musées et l’absence de représentation par des galeries pourraient expliquer la faiblesse de ce segment en France. Cf M. BLONDEAU, in Rapport Y GAILLARD, « Marché de l’art, les chances de la France », précit.